Dans un pays qui regorge de paysages contrastés, il est facile de spéculer sur les autres noms que l’histoire aurait pu donner à l’Islande. Pourquoi pas Feulande ou Glacelande ? Peut-être même Laveland aurait-elle du sens ?
En raison de son éloignement dans l’Atlantique Nord, l’Islande a été l’une des dernières terres émergées à être peuplée, les premiers colons arrivant au VIIe siècle. Si l’on se penche sur les premiers chapitres de la riche histoire de l’Islande, il apparaît que différents peuples ont découvert et nommé le pays à plusieurs reprises.
Chaque théorie met en lumière les formidables forces culturelles qui ont façonné l’Islande. Nous dévoilons ici une partie de l’histoire la plus ancienne du pays pour comprendre pourquoi l’Islande s’appelle Islande.
Islande : Est-ce nom lié au fait d’être une île ?
Ces dernières années, des preuves archéologiques sont apparues, indiquant que des peuples celtiques d’Écosse et d’Irlande ont habité l’Islande à partir d’environ 800 après J.-C., soit plus de 70 ans avant l’arrivée des premiers Vikings.
Dans la grotte de Kverkarhellir, dans la ferme de Seljaland, les universitaires ont mis au jour des dépôts de sédiments datant d’environ 800 ans après J.-C. Sur un deuxième site du groupe de grottes de Seljalandshellar, les archéologues ont découvert 19 sculptures murales de grande taille et quatre de taille moyenne, représentant le symbole chrétien de la croix. Bien qu’elles soient plus difficiles à dater, elles ressemblent beaucoup aux croix du début du Moyen Âge que l’on trouve dans l’ouest de l’Écosse.
Il existe plus de 200 grottes creusées par l’homme dans les terres agricoles du sud de l’Islande. On pense que les premiers habitants de ces grottes avaient des liens avec les communautés monastiques irlandaises des îles écossaises. Comment ces premiers colons appelaient-ils l’Islande ?
Il a été suggéré que les Celtes ont nommé cette nouvelle terre « île ».
Si vous louez une voiture lors de votre voyage en Islande, le sud offre la route populaire Conduite de la côte sud, qui navigue le long de la côte épique privilégiée par les premiers colons celtes : avec des chutes d’eau, des sources chaudes, des piscines naturelles, des plages de sable noir et des glaciers le long du chemin.
La théorie celtique apporte un éclairage intéressant sur l’origine du nom de l’Islande. Alors que les Islandais d’aujourd’hui appellent l’Islande comme ça, le nom s’écrit Ísland et se prononce comme on lirait, prononçant toutes les lettres. Dans d’autres langues, le nom de l’Islande n’est pas lié à la glace, mais au mot « île ». Malgré cela, ce sont les Vikings, et non les Celtes, qui sont généralement à l’origine du nom de l’Islande.
Plusieurs aventuriers nordiques revendiquent la découverte et le nom de l’Islande. Leurs récits d’audace sont bien documentés dans deux ouvrages essentiels de l’histoire culturelle de l’Islande : Íslendingabók et Landnámabók. Rédigés au XIIe siècle, ces ouvrages sont les plus anciens témoignages de la découverte et de la colonisation de l’Islande et reflètent des générations d’histoires orales vikings.
Alors, qui a nommé l’Islande ?
Cet honneur est généralement attribué au premier colon norvégien Hrafna-Flóki Vilgerðarson. Vers 868, Flóki a traversé la mer de Norvège à l’Islande. Voyageant avec sa famille, son équipage, son bétail et trois corbeaux (Hrafna signifie corbeau en islandais), son objectif était de s’installer sur une nouvelle terre découverte par des aventuriers vikings plus anciens : Naddoður Ásvaldsso et Gar∂ar Svavarsson (nous y reviendrons).
L’histoire raconte qu’au moment de quitter les îles Féroé, Flóki a relâché ses trois corbeaux. Le premier s’envola vers les îles Féroé, le deuxième revint au bateau, mais le troisième s’envola vers le nord-ouest et ne revint pas. Cela suggère que la terre est proche et Flóki met le cap au nord-ouest.
Le corbeau conduisit le navire jusqu’en Islande et Flóki installa son camp à Vatnsfjörður, à Barðaströnd, sur la rive sud de la péninsule des Fjords de l’Ouest. Malheureusement, après un été agréable, le bétail périt faute d’avoir été bien préparé pour le rude hiver islandais.
Ce groupe de premiers colons fut contraint de partir. On raconte qu’avant de retourner en Norvège, Flóki, dépité, fit une randonnée dans les montagnes des Fjords de l’Ouest, où il aperçut des icebergs flottants à Vatnsfjörður et voilà : La glace et la terre sont devenues l’Islande. *
Aujourd’hui, une grande partie des Fjords de l’Ouest reste sauvage et préservée, ce qui en fait un endroit idéal pour les amateurs de nature. Louer une voiture est le meilleur moyen d’atteindre des endroits reculés comme Látrabjarg, l’une des plus grandes colonies d’oiseaux d’Europe. Un endroit idéal pour apercevoir un macareux moine !
De retour en Norvège, Flóki parle avec amertume de ce pays qu’il appelle l’Islande. Cependant, l’un de ses hommes d’équipage était d’un avis différent et décrivait un paradis où « même l’herbe dégoulinait de beurre ». Il n’est donc pas surprenant que de nombreux autres Vikings aient suivi les traces de Flóki et que son nom maudit ne les ait guère dissuadés de s’installer en Islande.
Quelques années plus tard, Ingólfur Anarson s’est installé avec succès sur l’île, et l’âge des Vikings a commencé. L’irrésistible magie de l’Islande se traduit par le fait que même Flóki a choisi d’y revenir pour s’y installer définitivement.
*Ce penchant viking pour une approche « dites ce que vous voyez » pour nommer les lieux est assez courant. Prenez Reykjavik, par exemple, qui se traduit par « baie enfumée » en raison des cheminées volcaniques actives dans la région.
Les noms qui n’ont pas marché
Avant que Flóki et ses corbeaux ne s’envolent pour l’Islande, un Norvégien du nom de Naddoður Ásvaldsso fut détourné de sa route alors qu’il naviguait des îles Féroé vers la Norvège. Naddoður a débarqué à l’est de l’Islande en été. Certains documents suggèrent qu’il est resté pour la saison, mais n’ayant trouvé aucun signe de vie, il a repris la mer et a baptisé ce nouveau territoire Snæland (Ce nom signifie Neigelande, qui pourrait avoir été Snilande en français).
Aussi charmant que cela puisse paraître, Snæland n’a pas eu le vent en poupe. Pas plus que le nom proposé par l’aventurier suédois Gar∂ar Svavarsson. S’il avait réussi, nous vivrions aujourd’hui sur l’île de Gardar. Svavarsson a débarqué en Islande vers 860 après J.-C., lorsqu’une tempête dans le Pentland Firth a fait dévier son navire de sa route et l’a conduit dans l’Atlantique Nord.
Approchant l’Islande par le sud-est, Gar∂ar a suivi la côte vers l’ouest et a fini par découvrir que cette nouvelle terre mystérieuse était une île. Il accosta à Skjálfandi, une baie du nord de l’Islande, et explora la région pendant environ un an depuis sa base de Húsavík, qui fait aujourd’hui partie du fantastique itinéraire en autotour du Cercle de Diamant.
Avant son départ, Svavarsson déclara (plutôt modestement) que l’île nouvellement découverte devait être connue sous le nom de Garðarshólmu ou île de Gardar. Quel dommage pour le pauvre Gardar que ce nom ne soit pas resté.
Le nom alternatif ?
Nous avons émis l’hypothèse que Feulande, Glacelande ou Lavelande pourraient être des noms tout aussi appropriés pour l’Islande. Cependant, si Flóki avait choisi d’escalader une autre montagne, la vue et le nom qui en aurait résulté auraient pu être très différents.
Mais vous êtes-vous déjà demandé pourquoi l’Islande est très verte et le Groenland (qui s’appelle en anglais Greenland, comme si on l’appelait Vertlande en français) très glacé ? C’est un peu comme s’ils avaient échangé leurs noms ! Surtout si l’on considère que seuls 11 % de l’Islande sont recouverts d’une couche de glace permanente, contre plus de 80 % du Groenland.
Cette observation ironique se cache derrière un mythe largement répandu selon lequel les premiers colons vikings auraient baptisé l’Islande afin de dissuader les colons potentiels d’affluer vers leur nouveau paradis. Après tout, qui choisirait de vivre dans un pays de glace, surtout quand le Groenland tout proche semble si attrayant ?
La vérité est davantage liée au changement climatique qu’à une astucieuse conspiration des Vikings.
Des données scientifiques montrent qu’entre 800 et 1300 après J.-C., le sud du Groenland était nettement plus vert et plus chaud. Ainsi, lorsque Erik le Rouge a débarqué au Groenland* en 982, le nom qu’il a choisi pour le pays était parfaitement logique. Cependant, le petit âge glaciaire du XIVe siècle a fait chuter les températures au Groenland. Ce climat plus froid a dévasté les cultures et forcé les premiers colons nordiques à abandonner le pays.
Aujourd’hui, on constate à nouveau l’impact du changement climatique, avec la fonte des calottes glaciaires du Groenland due au réchauffement de la planète, qui laisse place à des paysages plus verts. Pour équilibrer le tout, nous verrons probablement plus de glace dans le Pays de glace et de feu à l’avenir. L’eau de fonte des glaciers refroidissant l’Atlantique Nord, le Gulf Stream, qui maintient actuellement l’Islande à 10 degrés de plus que le Groenland, devrait ralentir, entraînant des climats plus froids en Islande.
* Bien sûr, le Groenland avait déjà un nom donné par sa population inuite. Les Groenlandais d’aujourd’hui sont revenus à ce nom d’origine ; ils appellent leur pays Kalaallit Nunaat, ce qui signifie « Terre du peuple ».
Vous savez maintenant tout sur le nom de l’Islande et sur sa fascinante histoire celtique et nordique. Pourquoi ne pas suivre les traces de Flóki (les corbeaux sont facultatifs) et venir découvrir un peu mieux notre pays ?
Vous trouverez sur notre blog de nombreux autres conseils pratiques et idées inspirantes sur les meilleures façons de préparer le voyage de votre vie.
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